Après de longues heures d’attente sur le quai de Puerto Gracias, le ferry fait son apparition vers 1h du matin. Nous trouvons rapidement un petit coin tranquille sur le pont pour installer nos duvets et dormir un peu. Après une nuit bercée par les vagues, nous arrivons pour le lever de soleil a Granada. Nous traversons les rues désertes (il est 5h30 du matin) de la plus vieille ville coloniale d’Amérique Centrale. N’ayant pas de couchsurfeur, nous partons immédiatement à la recherche d’une auberge de jeunesse. Il est encore trop tôt et tout est fermé, nous prenons donc le temps d’aller petit-déjeuner dans un restaurant tenu par un allemand. A l’ouverture de l’auberge, le réceptionniste n’est pas sûr d’avoir des places en dortoir et nous devons attendre quelques heures dans des hamacs que des lits se libèrent. En fin d’après-midi, une ballade dans la ville nous amène vers la place de l’église où une étrange cérémonie est en train de se dérouler… La jeunesse est en liesse, c’est la canonisation de Juan Pablo II ! Écran géant, nourriture à profusion et groupe de musique accompagnant le sermon du prêtre enflamment les spectateurs. ¿ Qiuen vive ? ¡ Cristo ! ¿ Quien vive ? ¡ Cristo ! Scande la foule à plusieurs reprises. Nous n’y resterons pas très longtemps car nous nous sentons un peu oppressés par cette ferveur religieuse. Encore fatigués de notre traversée du lac, nous passons un dimanche tranquille en attendant Nat qui se trouve pour le moment à Managua.
Playa Poneloya, un petit endroit sympa pour dormir à la belle étoile !
Après 8 jours de séparation, nous nous retrouvons dans la ville de Léon au Nicaragua, en pleine Semana Santa. Cette fête catholique célébrée dans toute l’Amérique Latine commence réellement le jeudi saint, Juste avant Pâques. Outre les processions religieuses et autres reconstitutions grandeur nature (crucifixion de Jésus…), la plus part des gens profite de cette semaine de vacances pour voir leur famille et faire la fête sur les plages. La ville est pleine de vacanciers et nous profitons de l’ambiance générale pour sortir dans les rues animées, ce qui est plutôt rare en temps normal passé huit heures du soir. A la sortie d’un bar, nous tombons par hasard sur le frère de notre couchsurfeur salvadorien, il est en voyage avec deux amis espagnol et chilien. Nous allons dans une boite de nuit ou Francisco apprend à Margerie quelques pas de meringue et de salsa. Le ledemain matin nous décidons de suivre la jeunesse Nicaraguayenne et d’aller à la plage à seulement 20 kilomètres de Léon. Après quelques heures de lutte éreintante contre les vagues et les courants forts du Pacifique, nous négocions avec le patron d’un hôtel pour dormir sur son petit terrain au bord de la plage. Nous assistons ensuite à un concert en plein air d’un groupe local sur fond de feu d’artifice. Après un petit tour sur la plage pour goûter à l’ambiance festive (cocktail à base de Flor de Caña, le rhum du pays, et Djs instalés au bord de l’eau) nous retournons vers nos quartiers sous un magnifique ciel étoilé. Le lendemain matin, nous partons pour une journée de transport avec une petite halte à Léon pour déjeuner. Le hasard fait encore bien les choses, nous tombons nez à nez avec Alfonso, le frère de Francisco en route lui aussi vers les plages.
Nous entamons aujourd’hui notre descente accélérée vers le Costa Rica. La partie Salvadorienne, environ 200km jusqu’à la frontière, se fait en 8 voitures et seulement quelques heures. L’un d’entre eux était un adorateur de Dieu et a tenté tant bien que mal de me prouver l’existence de ce dernier. Il réfutait la science et toutes les avancées que l’homme a fait depuis quelques siècles. Nous nous quittons en bon terme même si l’ignorance total de cet homme en dehors de la Bible m’a donné l’impression d’être en face d’un fanatique tout droit sorti de l’époque de l’obscurantisme religieux… Deux amis en route pour négocier des contrats de distribution de médicament nous prennent en stop. Nous n’avons plus que deux dollars en poche et ils nous invitent dans un restaurant routier. Nous passons sans encombre le poste frontière du Salvador, traversons le pont pour rejoindre le Honduras et là ça se complique. Le douanier nous demande trois dollars chacun pour tamponner nos passeports. Nous lui expliquons que nous n’avons plus d’argent, que nous voyageons en stop et que nous dormons en camping. Cela le fait bien rire et il nous invite à retourner 10 kilomètres en arrière pour retirer de l’argent. Il est déjà 17h et pour éviter de perdre du temps, nous prenons un tuc-tuc jusqu’au distributeur le plus proche. Celui-ci n’acceptant pas les cartes Visa, nous ne pouvons pas payer notre chauffeur qui repart dépité. Nous tentons le stop pour aller à la prochaine ville quand Guillaume repère une femme haut perchée sur ses talons se dirigeant vers un 4×4 de luxe à l’arrêt. Après lui avoir expliquer notre situation, le chauffeur nous donne gracieusement 20 dollars. Nous commençons a chercher un bus pour retourner à la frontière lorsque le couple repasse devant nous et nous invite à embraquer.
C’est notre jour de chance, notre couple de bienfaiteurs va jusqu’à Managua. Ils vont nous avancer tous les frais jusqu’au Nicaragua et nous éviter d’avoir à changer de l’argent au Honduras. Ils tiennent un garage automobile dans la capitale et font régulièrement des voyages transfrontalier pour importer des pièces spécifiques, introuvables au Nicaragua. Le chemin est encore long et la deuxième frontière est fermée la nuit. Nous nous arrêtons donc sur la route dans un hôtel plutôt luxueux. Après leur avoir expliqué notre manière de voyager et le fait que nous ne pouvions pas nous permettre de payer ce genre d’hébergements, nous demandons à l’accueil si il est possible de camper dans le jardin. Le réceptionniste accepte mais quelques minutes plus tard, notre conducteur revient vers nous avec les clés d’une chambre et nous dis que pour le remercier, nous n’aurons qu’a l’inviter chez nous lorsqu’ils voyagera en France. C’est la première fois que l’on nous paye une chambre lors de nos trajets en stop et c’est également l’endroit le plus luxueux où nous ayons dormi depuis le début de notre voyage ! Le lendemain, ils viendrons frapper à notre porte pour continuer la route et nous n’aurons même pas à chercher de voiture pour la suite ! Nous nous relaxons et profitons au maximum de notre lit king-king size et de la salle de bain immense, avec la première baignoire du voyage.
Vers 7h30, nous préparons nos sac et embarquons pour s’arreter quelques minutes plus tard dans un petit restaurant. Desayuno typique avec Gallo pinto (riz et frijoles mélangés), banane cuites, viande et avocat accompagné d’un petit jus d’orange. Notre couple fait ensuite un détour par Tegucigalpa pour y faire le tour des casses, toujours à la recherche de quelques pièces détachées. 4h plus tard, nous reprenons la Panaméricaine vers le Nicaragua pour passer la frontière vers 16h. Les papiers d’importation pour leur chargement prennent une bonne heure, ce qui n’est pas beaucoup pour ce genre de vérifications. Les douaniers n’ont pas d’ordinateurs ici et doivent vérifier les valeurs des marchandises dans des grands registres papiers. Ce genre d’opération de contrôle peur durer jusqu’à 5h pour l’équivalent d’un coffre de voiture, Les semi-remorque eux comptent en général une journée entière pour passer la frontière. Nous nous arrêtons ensuite dans un petit restaurant cubain tenu par un amis à eux où nous goûtons pour la première fois le Yuca. C’est une sorte de tubercule qui ressemble fortement à la pomme de terre en un peu plus ferme. Notre repas est accompagné d’une Toña, la bière du Nicaragua. Nous reprenons la route pour les quelques heures restantes. N’ayant toujours pas de réponse de couchsurfing, José et Scarlett nous prêtent pour la nuit leur maison secondaire. Nous avons le droit à une chambre avec climatisation, cuisine et patio, le grand luxe une fois de plus. José nous donne rendez-vous le lendemain matin pour nous montrer son entreprise et nous faire profiter de la connexion internet de son bureau.
Coup de théâtre à Managua
Après un petit tour au garage automobile de José, nous prenons un déjeuner copieux dans un boui-boui au coin de la rue. Il nous dépose ensuite dans une grand centre commercial où nous allons passer la journée à la recherche d’une solution d’hébergement. Nous assistons ainsi à un samedi typique des nicaraguayens : arrivée à l’ouverture pour petit déjeuner dans le food court (BigMac et poulet fris à 10h30, normal…), assister à un concours de danse pour tous les ages, séance de dédicace de célébrités locales et enfin karaoké pour terminer la journée. Nous y voyons passer des groupes de jeunes, des familles avec des bébés en bas âge et des clowns distribuant des ballons aux enfants. Au bout de 6h d’internet, Nat, le copain anglais de la colocataire de Margerie, se connecte sur notre réseau social préféré. Il est actuellement à Masaya, à 30 km d’ici. Nous décidons de le rejoindre dans la soirée et fixons un rendez-vous dans le parque central.
Nous rassemblons nos affaires afin de rentrer à la maison pour ensuite prendre un bus, car il fait déjà nuit. 5 min à peine après avoir quitté le centre commercial, un jeune homme s’avance vers nous d’un pas décidé et nous dit dans un parfait anglais « give me your fucking money ! « . Après trois mois passés dans les pays les plus « dangereux » d’Amérique Centrale, il fallait qu’il se passe quelques chose pour respecter les statistiques, malheureusement pour elles cela se passe passe dans la capitale la plus sûre de cette région du monde (le Nicaragua est le deuxième pays le plus sûr du continent après le Canada ! ). Vu l’insistance de notre agresseur et la taille de son couteau, nous lui cédons quelques billets ainsi que notre téléphone portable, pour une valeur totale d’environ 30 euro. Cela nous permet de repartir tranquillement avec notre appareil photo, notre ordinateur, nos cartes bleues et tous nos papiers. Heureusement pour nous, ce n’était qu’un petit joueur dans la catégorie « agression de rue ». Une fois rentré à la maison nous expliquons la situation à José grâce au téléphone de la voisine. Il vient nous chercher quelques heures plus tard pour nous emmener directement à Masaya.
Arrivés à Masaya relativement tard (minuit),nous avons raté notre rendez-vous et nous tournons en voiture afin de trouver l’Hôtel Central où loge Nat… Au bout d’une demi heure et plusieurs détours, nous le trouvons fermé. Nous quittons José en le remerciant mille fois de sa générosité et partons à la recherche d’un lieu où dormir. Il est très tard, il n’y a quasiment personne dans les rues et les hôtels sont tous fermés… Notre bonne étoile à encore frappé ! Un gardien de nuit nous emmène devant la porte d’une auberge, mais personne ne vient nous ouvrir. Embêté, il nous invite à dormir chez lui. Il nous offre son lit et dormira dans le hamac une fois rentrée de sa garde. Nous discutons un peu avec lui et apprenons qu’il s’appelle Guillermo, cela le rend fou de joie d’avoir un homonyme français dans sa demeure. Nos plans de la journée ont été un peu chamboulé et nous décidons de dormir avant de reprendre notre chasse à l’anglais.
Nous arrivons de nuit à Cobán et marchons en direction de la sortie de la ville pour trouver un endroit où planter notre tente. Nous croisons des habitants et nous leur demandons s’il serait possible d’avoir un petit bout de terrain dans leur jardin. Nous sommes dirigés vers une maison (sans chien de garde !) surplombant la route. Une mère de famille accepte notre requête et nous commençons à monter notre camp. Le père arrive quelques minutes plus tard et nous offre un café et du gâteau à la banane pour entamer la conversation. Il est rejoint par ses deux filles jumelles ainsi que son fils aîné. Nous passons la soirée à pratiquer notre espagnol et remercions notre bonne étoile de nous avoir guidé vers cette famille très accueillante. Après un réveil félin (le chat de la maison s’est installé tranquillement sur le toit de notre tente !) nous sommes invités à prendre notre petit-déjeuner à la table familiale. Au menu friroles, bananes frites, tamales, oeufs brouillés, tortillas, gâteau le tout accompagné de café et de jus de fruit fait maison ! Repas de rois ! Nous prenons quelques photos avec nos hôtes et reprenons la route le ventre plein.
Notre compagnon de camping.
Notre programme à la base était de rejoindre la côte du Salvador en deux jours, en faisant étape un peu après la frontière. C’était sous estimer nos chauffeurs ! En effet nous n’avons mis qu’une journée à atteindre notre but. Nous passons la frontière en début d’après-midi, mais cette fois nous ne nous faisons pas avoir, nous allons voir directement les douaniers pour rentrer en toute légalité. A notre plus grand désarroi, nous apprenons que le Salvador ainsi que le Honduras, ne tamponnent pas les passeports ! Nous entrons cependant sans encombre dans le 3ème pays de notre tour du monde. Deux différences sont notables dès les premières heures de route : le pays semble plus pauvre que les deux précédents, mais les voitures s’arrêtent deux fois plus rapidement qu’avant, à notre plus grande joie. Nous découvrons des Salvadoriens très accueillants et serviables. Ils nous parlent de leur pays et des endroits touristiques, cependant chaque conducteur nous fera part de « l’atmosphère dangereuse » qui règne dans la région. La guerre, qui s’est pourtant fini il y a plus de 20 ans, semble avoir beaucoup marqué les esprits, ainsi que la présence de gangs dans certaines parties du pays. Nous leur promettons d’être prudents, mais décidons de nous faire notre propre opinion. Le Mexique ainsi que le Guatemala étaient aussi des pays « très dangereux », nous n’y avons croisé que des âmes charitables et une ambiance agréable.
Mangue terminée à l'arrière d'un pick-up.
Arrivée à Sonsonate, à 20 km de la mer, il fait déjà nuit et nous décidons de prendre un bus pour rejoindre Acajutla. Bien mal nous en a pris ! Les bus sont beaucoup plus long à attendre que les voitures qui nous prennent en stop ! Nous arrivons une heure plus tard un peu à l’écart du centre-ville, entre un terrain de basket et un église. Nous marchons en direction de la plage, et voyant une famille se relaxer dans leur jardin, nous décidons de retenter notre chance. Encore une fois notre bonne étoile nous sourit et le père nous trouve un petit endroit au fond de son jardin où planter notre tente. Nous leur offrons des mangues et des nísperos en échange de leur hospitalité . Au petit matin, nous n’avons qu’une seule hâte, trouver la mer pour se détendre de quatre jours sur la route. Nous découvrons une immense plage de sable noir, d’origine volcanique. L’endroit se remplit petit à petit de familles, et les jeunes entament des parties de football entre mer et sable. Nous réalisons que nous sommes dimanche, et savourons ce petit moment de tranquillité, face à l’immensité de l’océan.
Bord de plage.
Ces derniers jours ont été pour nous comme une nouvelle étape dans notre manière de voyager. Nous avons eu l’occasion de rencontrer des personnes modestes, au grand coeur qui nous ont ouvert les portes de leur maison spontanément et sans préjugé. Les occidentaux (en général) ont encore beaucoup de chemin à faire avant d’arriver à ce niveau d’accueil. Ou alors, peut-être l’ont-ils simplement perdu au cours de ces dernières décennies de »progrès »…
Mur de "Guate" (petit nom de Guatemala City) avec les affichettes de personnes disparues
Depuis notre arrivée au Guatemala, une personne sur deux nous parle de Semuc Champey et de ces cascades d’eau claire. Nous avons donc décidé d’aller y faire un tour pour voir ce lieu si incroyable de nos propres yeux. Le départ d’Antigua est un peu hésitant et après quelques minutes de marche dans la mauvaise direction, nous prenons enfin la route de la capitale à bord d’un pick-up. Notre conducteur nous parle de religion et je tente tant bien que mal de lui expliquer qu’en Europe, la foi est bien différente de ce qu’elle a pu être et que les gens n’ont pas le même rapport à la religion que les guatémaltèques. Le débat est intéressant mais nous arrivons à Guatemala et nos chemins se séparent. Nous sommes immédiatement happés par le vacarme assourdissant de la ville. L’air est chaud et pollué, les rues sont longues et sales et les quartiers se succèdent sans se différencier. Nous passons un peu plus de deux heures à chercher la sortie de cet enfer urbain où nous aurions pu rester bloqués bien plus longtemps si un local ne nous avait pas conduit jusqu’à la sortie. A l’avenir, nous éviterons les grandes capitales à moins qu’il n’y ait un attrait majeur qui vaille le coup de s’y attarder. Nous continuons notre route vers le nord avec un Américain et sa femme et terminons la journée de stop à bord d’un semi remorque. Ce dernier nous dépose sur le bord de la route au milieu des montagne en pleine nuit. D’après lui, il y a un hôtel 500 mètres plus loin et nous n’avons pas d’autre choix que de suivre ses indications pour trouver un endroit où dormir. Après avoir pris un repas au restaurant, nous demandons gentillement si nous pouvons dormir dans un espace commun sans payer de chambre car nous n’avons pas assez d’argent sur nous. La gérante accepte notre requête et nous confie au gardien de nuit. Nous nous retrouvons quelques minutes plus tard dans un local où sont entreposés les anciens matelas de l’hôtel. Nous avons une trentaine de sommiers à notre disposition et passons une de nos meilleures nuits sur la route.
Repos au bord de la rivière.
Le lendemain, nous avançons rapidement jusqu’à Coban, mais la situation se complique lorsque nous arrivons sur les routes de campagne où 90% du trafic est effectué par des collectivos. Nous arrivons a grimper à l’arrière d’un camion qui transporte du matériel de construction. Notre chauffeur s’arrête plusieurs fois en chemin et nous nous retrouvons vite au milieu d’une quarantaine de poules, d’un dindon, deux fermières et un enfant ainsi que d’une poignée d’agriculteurs du coin allant vendre leur récolte sur les marchés. A l’instar des chikenbus, qui sont en fait des cars scolaires américain simplement peints à l’extérieur, notre moyen de transport aurait bien mérité cette appellation. Une fois à Lanquin, la situation se corse encore plus, l’asphalte à déjà disparu depuis un bon moment et ce sont les véhicules qui manquent. Nous ne sommes plus qu’à 9 kilomètres de notre but et nous décidons d’entamer le chemin à pied. Le Soleil est encore haut et nous sommes descendus en altitude, il fait environ 30 degrés et nous sommes sur un chemin de montagne avec des montées et des descentes implacables, autant dire qu’avec nos gros sacs à dos, la partie n’est pas gagnée d’avance. A la première voiture, au bout d’une bonne heure, nous levons le pouce et montons avec le conducteur. C’est un pick-up normal mais il transporte un nombre exagéré de personnes et de marchandises. A l’arrivée il nous demande de payer et devant l’insistance des autres personnes qui nous entourent, nous avons beau essayer de leur expliquer le principe de l’auto-stop, ils ne veulent rien savoir. Je ne leur laisse que la moitié de ce qu’ils me réclament sans leur donner le choix. Nous avons horreur des gens qui s’improvisent collectivos publique et font payer les gens qu’ils ramassent sur le bord de la route, surtout lorsqu’ils nous soutiennent que ça se passe toujours comme cela et que rien n’est gratuit. Nous nous dirigeons vers la rivière et noyons notre rage dans l’eau fraîche. Ici le paysage est calme et magnifique, nous décidons d’y trouver un petit coin à l’écart de la route pour y passer la nuit.
Vue du mirador.
Le lendemain, nous faisons nos sacs rapidement et partons vers l’entrée du parc de Semuc Champey. Il est encore tôt mais la chaleur commence déjà à se faire sentir. Nous déposons nos affaires dans la cabane du gardien et nous nous lançons à l’assaut du mirador avec le strict minimum. Nous nous préparons psychologiquement à gravir des pentes escarpées pendant 1h15 (ce qu’indique le panneau de direction du mirador)… Nous arrivons, avec surprise, seulement 15 minutes après au point de vue. Du haut de la falaise nous avons une vue imprenable sur les piscines naturelles du site. Sur environ 300m, la rivière emprunte un passage souterrain tandis que les petits ruisseaux alentours viennent alimenter les bassins de surface qui se déversent les uns dans les autres. L’eau y est claire et peu profonde ce qui permet au Soleil de la réchauffer à une température idéale pour la baignade. Les couleurs sont superbes et nous rappellent celles du parc de Plitvice en Croatie. Le site Guatémaltèque est beaucoup plus petit mais présente l’énorme avantage de la baignade autorisée. Nous passons une bonne heure et demi à profiter de ce joyau de la nature et à nous délasser dans les eaux turquoises. Au retour, nous décidons de prendre directement un collectivos pour Coban, ce sera beaucoup plus rapide et cela nous évitera les mauvaises surprises. Le retour se fait dans une ambiance de colonie de vacances avec un groupe de jeunes Canadiens en périple pour 2 semaines au Guatemala.
Après avoir contacté l’ambassade de France et l’alliance française de Xela, nous prenons conscience qu’il va falloir trouver un moyen de faire tamponner nos passeports pour régulariser notre situation. Cela fait une semaine que nous sommes rentrés au Guatemala et nous sommes toujours « clandestins ». Trois choix s’offrent à nous : contacter les services d’émigration et entamer des procédures interminables et douteuses (conseil de l’Ambassade); aller voir une agence de tourisme qui fait des allers retours à la frontière pour faire tamponner les passeports des étrangers qui ne veulent pas ressortir du pays, pour 450 quetzals chacun et une semaine d’attente (conseil de l’alliance française) ou enfin, retourner à la frontière en stop, la repasser dans l’autre sens et aller faire un grand sourire aux douaniers comme si de rien n’était. Finalement nous optons pour la troisième solution et nous embarquons pour une grosse journée de stop. Onze conducteurs et environ 9 heures nous sont nécessaires pour retourner à la frontière, passer la douane et revenir à notre point de départ. La nuit est tombée et nous sommes en plein milieu de la ville dans un carrefour d’où partent des routes pour les quatre coins du pays. Impossible de trouver un endroit pour dormir tranquille dans les environs. Nous prenons donc un bus qui nous emmène directement jusqu’à un petit village, au bord du lac Atitlan.
Rive sud
Vue sur le volcan San Pedro, depuis Santiago.
Nous arrivons à San Pedro La Laguna vers 21h. Un attroupement sur une grande place nous attire et nous nous retrouvons en quelques instants en plein match de basket entre deux équipes féminines de la région ! Tous les spectateurs sont absorbés par le match et les enfants tournent autour du terrain en jouant avec des ballons. Ils attendent la fin de la mi-temps avec impatience pour envahir la zone de jeu et tester leur précision sur les paniers des grands ! Nous nous promenons un peu dans le centre avant de descendre en ligne droite sur les bord du lac où nous plantons la tente. Nous nous levons aux aurores avec le soleil et profitons de la fraîcheur du matin pour écrire et dessiner un peu. Après une ballade rapide dans le village et un petit tour sur internet, nous prenons le bateau pour traverser le lac en direction de Santiago, la plus grande ville du lac. Nous n’y passons que le début d’après-midi car à part les dizaines de marchands d’artisanat et le marché typique, il n’y a pas grand chose à voir. Nous décidons de faire le tour du lac en auto-stop pour profiter de la vue des routes de montagnes.
Rive Nord
Coucher de soleil sur les montagnes.
Après quelques heures de trajets au milieu des plantations de café et avec une vue imprenable sur le lac et ses montagnes, nous nous retrouvons dans un petit village à une quinzaine de kilomètres de Panajachel, notre destination. Il est déjà 17h passé et le coucher de soleil ne va pas tarder. Nous décidons et de rester sur les hauteurs et de nous trouver un petit coin pour admirer les couleurs du soir et monter notre campement. Nous tombons sur un point de vue perché sur une falaise à 500 mètres au-dessus du lac. Un peu en retrait de l’autre côté de la route, des ruines d’une ancienne église et d’une petite maison nous offre un refuge idéal pour la nuit. Nous faisons un feu de bois et nous installons à l’abri du vent dans notre maison sans toit ni fenêtres. De nouveau réveillé par la lumière du jour, nous guettons l’arrivé du Soleil à l’horizon avant d’entamer une petite marche matinale. L’air est frais et la route descend lentement jusqu’à Panajachel, nous avançons sur le bord de la route pendant environ 2h et arrivons dans la ville touristique du lac. Les bars, restaurants hors de prix pour les locaux et les hostels pullulent dans la rue principale. Nous avançons jusqu’à « la plage » qui n’est en fait qu’une pelouse en terrasses à moitié effondrées sur les berges du lac. Cela ne nous freine pas et nous plongeons dans les eaux fraîches pour relaxer nos corps durement malmenés ces derniers jours. Nous allons sur internet pour voir si nos appels sur couchsurfing ont porté leurs fruits pour Antigua. Malheureusement nous n’avons reçu aucune réponse. Nous lançons un SOS sur le groupe de la ville, comme pour Xela, et nous décidons de rester une nuit de plus sur le lac où nous serons bien mieux qu’en centre-ville sans endroit où dormir.
Rencontres internationales
Nuages du soir.
Nous passons la fin d’après-midi sur la plage à rédiger des articles pour le blog en attendant le coucher de Soleil. Nous faisons la rencontre de deux Suisses et d’un Hondurien. Garry, Mario et Victor nous proposent de laisser nos sacs dans leur chambre d’hôtel et de passer la soirée avec eux. Garry et Mario voyagent seuls en Amérique centrale et se sont rencontrés en chemin. Ils ont passé quelques jours ensemble et se séparent demain. L’un traverse le lac tandis que l’autre part pour Antigua. Victor habite ici à Panajachel, il a rencontré les deux suisses dans un village du coin et leur a proposé de leur montrer un hôtel pas cher. Il nous emmène ensuite dans un petit restaurant puis dans un bar. A chaque fois, il demande une petite réduction ou un pourboire aux gérants en échange de nouveaux clients pour leur établissement. Au Guatemala il est très difficile de trouver du travail et la plus part des gens font ce qu’ils peuvent pour gagner un peu d’argent, Victor est rabatteur indépendant, c’est sa façon à lui de gagner sa vie. Nous passons une excellente soirée et restons longtemps à parler de voyage avec nos amis suisses d’un soir. Nous leur donnons notre carte de visite et allons camper au bord du lac un peu à l’écart de la ville.
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En route pour Antigua
Réveil sur le lac ensoleillé.
Au petit matin, nous allons prendre un jus d’orange pressé et quelques petits donughts dans une boutique que nous avions repéré la veille. Nous passons ensuite sur la toile et constatons avec joie qu’une française accepte de nous venir en aide en nous prêtant un bout de sol dans son petit appartement. C’est notre seule option et nous sautons sur l’offre. Nous récupérons ensuite nos sacs à dos à l’hôtel et nous nous dirigeons vers la sortie de la ville. Nous attendons un peu plus que la normale avant de trouver une voiture. Les guatémaltèques nous avaient habitués à plus de rapidité ! Nous décollons enfin et 3h de trajet seront nécessaires pour rejoindre notre destination. En route nous sommes pris en stop par le sous-gouverneur de l’Etat du Shimaltenango qui rêve de partir en Europe, mais il a beaucoup trop de travail ici pour le moment. Au mois de juillet dernier, une grosse tempête a détruit les routes et les habitations et de nombreux dégâts sont encore visibles. Notre dernier conducteur est très sympathique et enthousiaste. Il appelle sa fille pour qu’elle pratique son français avec nous. Il nous emmènera jusqu’à la place centrale et nous laisse son numéro de téléphone au cas où nous aurions besoin d’aide pendant notre séjour à Antigua.
Nous nous dirigeons vers la sortie de San Cristobal : environ 30 minutes de marche. Après deux mois d’auto-stop, nous avons remarqué que les sorties de ville sont les moins évidentes pour lever le pouce. Cette fois-ci la ville s’arrête sur un point de contrôle de police, ce qui arrange encore moins nos affaires ! Les gens s’arrêtent rarement près des « forces de l’ordre ». Notre première voiture est conduite par un couple de français partant à la découverte de Palenque. L’homme nous parle de sa jeunesse de baroudeur dans les années 80, en Amérique Latine. Malheureusement nous n’avons que peu de temps pour partager nos expériences car nos routes se séparent rapidement.
Quelques voitures plus tard, un mexicain d’une cinquantaine d’année nous emmène jusqu’à 3 km de la frontière avec le Guatemala. Guillaume s’installe à l’avant tandis que Margerie se cale sur les sacs à l’arrière du pick-up. Au bout de 45 min, il nous dit qu’il va jusqu’à 3km de la frontière et nous sommes repartis pour 1h30 de trajet, cela nous arrange bien mais Margerie, qui n’est pas au courant du changement de plan, commence à bronzer dangereusement. Pendant ce temps, la discussion va bon train et nous n’avons même pas pris le temps de nous présenter. Aucun des deux ne connaît l’identité de l’autre ni son activité professionnelle, cela donne une ouverture sur les sujets de conversation et nous parlons de pleins de choses : la politique des Etats-unis, Française et Européenne, Mexicaine, des problèmes en Libye et des révoltes du monde Arabe, des sports (le Basketball est le sport n°1 au Chiapas alors que le football n’est que pour les enfants!), des femmes, de sexe, de drogues et de leur légalisation, de corruption, du Chiapas, du Guatemala, de petits villages du coin… Bref une expérience unique où sont abordés des thèmes de société, de sciences humaines, d’économie, de politique et même d’ingénierie lorsque nous parlons des trains et du TGV.
Petites fleurs guatémaltèques.
Nous nous arrêtons à un croisement avec restaurant et « tope » (dos d’âne mexicain), la combinaison parfaite pour l’auto-stoppeur affamé sur les coups de 14h. Nous prenons notre dernier repas mexicain et nous y dépensons tous nos pesos jusqu’au moindre centime : 81,5$ (les pesos ont le même signe que le dollar américain). Quelques kilomètres plus tard, nous arrêtons une voiture à un arrêt de bus devant le regard ahuri des locaux qui attendent depuis plus longtemps que nous. Le chauffeur nous dépose à la Mesilla, côté Guatemala ! Aucun poste frontière, aucune douane, aucun policier en vue pour tamponner nos passeports. Nous cherchons un peu plus loin dans la ville mais il n’y a rien.
Il commence à se faire tard et nous décidons de partir en stop pour Quetzaltenango. Les collectivos sont pleins à craquer et nous montons à l’arrière d’un pick-up avec 15 personnes, le changement de pays est radical. Notre deuxième chauffeur nous enlève du bord de la route alors que nous tentons de rejoindre une station essence. Sur le plan de la rapidité, les guatémaltèques battent les mexicains à plate couture. Notre chauffeur et son fils nous déposent à 15 minutes de Xela (le nom maya de Quetzaltenango) et nous demande un petit dédommagement pour la course, c’est une première ! Nous n’avons encore aucun quetzalt et nous nous esquivons rapidement. Il fait déjà nuit noire et nous prenons notre premier chikenbus (schoolbus américain repeints à la mode guatémaltèque) pour rejoindre le centre ville. Notre seule option pour aller sur internet et joindre notre couchsurfer et d’aller dans un Wendy’s (concurrent direct de Mac Donald’s qui se trouve juste en face). Nous apprenons alors que notre hôte est à l’hôpital à la suite d’un accident de voiture et ne pourra pas nous recevoir. Nous envoyons pour la deuxième fois un SOS sur le groupe couchsurfing de la ville et une fois de plus la chance nous sourit et une âme bienveillante nous ouvre les portes de sa maison.